Entretien avec le Père Dominique
– Depuis quelques semaines les messes sont suspendues. Vous célébrez seul, dans une église vide ?
Oui. Or, la célébration communautaire avec le peuple de Dieu et pour le peuple de Dieu est le mode habituel de la célébration eucharistique. Que ce soit le dimanche ou en semaine, avec quelques personnes.
-La crise sanitaire et les risques afférents vous obligent à célébrer « privément ». Quel sens cela peut-il avoir ?
Nous suivons ces recommandations de prévention, autant par civisme que par charité. Il s’agit d’éviter la propagation du virus et de protéger les plus exposés, les plus fragiles d’entre nous.
Mais, indépendamment de la présence ou non des chrétiens, la Messe a un sens en elle-même et l’Eglise encourage vivement les prêtres à la célébrer quotidiennement, même si les fidèles ne peuvent y être présents.
Célébrer en solitude comme nous le faisons actuellement n’est pas un simple exercice de piété personnelle ! Cette célébration privée garde toute sa dimension communautaire et ecclésiale. C’est en communion avec la communauté qui lui est confiée que le prêtre agit au nom du Christ. Il intercède pour les vivants, les défunts. Il prie pour le monde et l’Eglise, attentif aux besoins de tous, partageant leurs tristesses et leurs angoisses, leur espérance et leur joie, comme nous le disons dans l’une des prières eucharistiques.
Et enfin, célébrer la Messe quelle que soit la conjoncture est aussi pour le prêtre un moment privilégié de communion intense avec le Christ dont la présence réelle, sacramentelle le pousse à se donner plus généreusement à sa mission au service de ses frères et sœurs, surtout les plus vulnérables.
J’ajoute que ce n’est pas le fait que l’assemblée soit réunie – et il faut tout faire pour qu’elle le soit ! – ni même la qualité de cette assemblée qui rend présent le Christ. C’est Lui qui se rend présent et appelle notre propre présence.
En cette période inédite, faute de ne pouvoir participer au rassemblement eucharistique à l’église, il est possible de suivre la messe sur les réseaux sociaux. Les propositions de manquent pas !
S’il croit vraiment à la Présence du Christ, un chrétien ne peut pas se contenter d’une eucharistie qui serait virtuelle et de chercher sur la toile celle qui lui convient ! Bien sûr, il en va autrement quand elle est célébrée en direct pour les personnes malades et pour des raisons majeures, comme celle que nous vivons aujourd’hui.
Le pape François lui-même a recours aux réseaux sociaux et sa messe quotidienne y est diffusée, mais c’est comme à regret « pour sortir du tunnel dit-il, pas pour y rester ».Il ajoute : « Attention cependant à ne pas virtualiser l’Eglise, à ne pas virtualiser les sacrements, à ne pas virtualiser le peuple de Dieu… Une familiarité intime, personnelle avec le Seigneur, sans communauté, sans le Pain, sans le peuple, sans les sacrements est dangereuse » (17.04.2020). C’est une mesure, disons provisoire, faute de mieux, dans l’attente de jours meilleurs.
Pour conclure, un souhait ?
Un souhait qui est aussi une prière : que chacun puisse à nouveau « désirer d’un grand désir » retrouver le chemin de l’église pour célébrer ensemble le jour du Christ ressuscité !